Fait divers.. : Comme un pere okay.
Michel Sardou chantait "il était là dans son fauteuil, mon spectateur du premier jour". Ce soir, c'était lui le prestidigitateur sans détour. Dans son fauteuil lui aussi, sans prompteur ni projecteur. Seul et seulement à la lueur d'une bougie. Lui si discret , si fatigué à cette heure prenait d'un coup de baguette magique toute la place qu'on lui attribuait. Chef de tribu, dans son tipi. Il se réchauffait par les flammes de sa cheminée, ses téléspectateurs bien assis. Ses yeux étaient illuminés des souvenirs qui affluaient. Cet homme grand et fort, imposant dans sa voix de ténor s'allégeait dans les histoires de sa vie. Il avait décidé ce soir d'être conteur..
Fils d'agriculteurs, cadet de ses soucis et de sa fratrie, déjà très tôt laboureur. Intrépide, insolent, déterminé, son âge n'était pas un critère révélateur. Loin d'une certaine candeur, on pourrait même lui donner le noir comme couleur. A cette époque, c'est lui qui faisait chanter les choeurs. Sa petite troupe se constituait d'amis, de ses frères aussi. Le dernier plus précisément. L'ainé, lui, surveillait leurs drôles de penchant.. A l'âge où les enfants d'aujourd'hui regardent des dessins animés, jouent dans leur nid, lui il c'était construit le sien, dans un autre abris. Il entassait là ses trésors de guerres, vengeurs de ses ancêtres. Il trompait ses parents, marchandait ses voisins, gonflait des grenouilles vivantes et les crucifiaient sans témoins. Il arpentait les routes, armés de fusils trouvés, courrait après les lapins. Plus tard, il sautait les flammes d'un feu de bois géant sur une moto de soûlard. Il cachait les habits de soldats, les casques et arpentait les blockhaus à l'aide de torches imbibées de petrôle et en bois. Voilà ce qui le faisait rire petit. Voila ce qui le faisait rire vieilli. Ses gestes et ses intonations l'habitaient. Comme si en lui, encore, ce petit garçon vivait. Aucune phrase n'étaient finies, il voulait sans cesse nous étonner. Il se dit pas très fier de lui, pourtant il aimait sa jeunesse pleine de vie.
Nous autres, nous l'écoutions, le regard ebailli. L'un riait, l'autre l'écoutait plus concentré. Moi, je le regardais, sans rien vouloir perdre de ce père que j'aimais. Quelque chose venait encore de changer. Ses folies, j'en avais déjà entendu parler. Son intrepidité, ses côtés sans peurs faisaient ce qu'il était aujourd'hui. Seulement, à cette veillée, il oubliait sa pudeur. Comme les perroquets, il répétait, comme ayant appris par coeur, les bonheurs de son epopée.Il revivait avec nous, il s'ouvrait. Il n'était pas question de bouger, ni de fermer les yeux. Ce temps là m'était précieux. J'étais peut être la seule à le trouver merveilleux. Même très beau devant ce feu. Son espièglerie a fait de lui, ce soir, la fierté de Noémie...
Photos tirés du blog "la malle aux rêves"